Patrick Pierron, ancien secrétaire général de la fédération chimie-énergie et secrétaire national de la CFDT

« Tout comme la démocratie, le dialogue social se fonde sur le vote »

Qu’est-ce qui vous a amené à orienter votre parcours professionnel vers le champ des relations sociales ?

J’ai intégré le monde des relations sociales à partir d’un conflit. Au début de ma carrière, la pratique de la négociation n’était peu, voire pas développée y compris dans les grandes l’entreprise. Seul le syndicalisme institutionnel avait sa place avec les heures d’information. En 86, un important mouvement de grève lié à des revendications salariales a éclaté à EDF. J’y ai pris part, je me suis syndiqué, et je suis devenu porte-parole d’une assemblée générale.

Cette grève a donné lieu en 87 au premier accord partagé au sein du groupe. Par la suite, j’ai exercé plusieurs fonctions à la CFDT jusqu’en 2014, dont celle de secrétaire général de la fédération chimie-énergie avant de rejoindre la commission exécutive jusqu’en 2014. Durant mon parcours, j’ai toujours valorisé la culture de la négociation et le dialogue social en général.

Quel regard portez-vous sur le dialogue social depuis le début de la crise provoquée par la pandémie de covid-19 ? Quelles sont les évolutions souhaitables pour l’avenir et quelles seraient les pratiques à conserver ?

Le dialogue social est une forme de démocratie contributive et représentative. Tout comme cette dernière, il se fonde sur le vote. A ce titre, les élus et organisations syndicales ont la responsabilité, par rapport à l’ensemble des salariés qu’ils représentent, de faire échos de leurs difficultés existantes, de trouver des solutions pour pallier ces dernières et de réduire les inégalités. La crise sanitaire a souligné, en fonction des métiers exercés et du statut dans l’entreprise, les disparités en termes de conditions de travail et de réalités quotidiennes. Malgré les difficultés techniques et l’impossibilité d’avoir un dialogue en présentiel, les organisations syndicales ont rempli leur rôle de donneur d’alerte, en médiatisant et en attirant l’attention sur la situation de certains travailleurs. Elles ont également pu négocier des avancées qui prennent en compte le contexte sanitaire et la qualité de vie au travail du plus grand nombre comme le télétravail ou certaines reconnaissances professionnelles par exemple.

Vous êtes adhérent de l’association Réalités du dialogue social dont la vocation est de promouvoir le dialogue social. Pourquoi est-ce si important pour vous ?

Le dialogue social permet, à partir de différents points de vue, de construire un projet partagé par le plus grand nombre :  c’est une forme de RSE. Il favorise l’émancipation, la responsabilisation et permet de donner la parole au plus grand nombre. Tout en reconnaissant l’individualisme, il permet de construire des revendications collectives et d’améliorer le quotidien de chacun.

Ainsi, pour éviter que l’entreprise soit un monde où la loi du plus fort règne, il faut un dialogue social qui régule la parole, porteur de propositions et enraie les inégalités.

Avec le groupe de travail « sensibilisation au dialogue social » que je pilote pour l’association, nous formons les nouvelles générations en intervenant au sein des écoles et universités. Réalités du dialogue social nous permet ainsi de transmettre notre vécu et cette conviction que le dialogue social est utile aux entreprises mais aussi à la société.

Avez-vous vu un film, écouté un podcast ou lu un livre que vous recommanderiez à la Communauté Réalités du dialogue social ?

Lorsque je travaillais à la CFDT, j’ai participé au grand jury du prix du roman d’entreprise et du travail. Les livres sélectionnés s’inspirent du monde du travail. En 2021, c’est Madeleine Assas pour son roman « Le Doorman » qui a été récompensée. Je le recommande !



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