Nicolas de Saussure, chef du service du pilotage des politiques de ressources humaines à la DGAFP

« Le dialogue social est une science d’exécution »

Qu’est-ce qui vous a amené à orienter votre parcours professionnel vers le champ des relations sociales ?

Je suis venu par hasard aux relations sociales mais j’y suis resté par goût et par conviction. J’ai débuté ma carrière en tant que magistrat administratif et j’ai effectué en 2008, une mobilité pour devenir chef de bureau des rémunérations et des retraites à la DGAFP, lieu où j’ai découvert le dialogue social, la concertation et la négociation. J’y ai pris goût et c’est finalement devenu le fil conducteur de ma carrière professionnelle. D’une manière générale, j’adore les échanges humains, la contradiction, le débat, et plus largement, découvrir et rencontrer de nouvelles personnes. Ce choix des relations sociales a également découlé d’une intime conviction : même avant d’être dans le secteur, j’ai toujours pensé qu’un compromis entre plusieurs acteurs est toujours préférable à la seule confrontation, qu’il est toujours plus efficace et surtout qu’il est toujours possible, à condition d’être créatif. Dans mon domaine, à la DGAFP, nous devons en permanence tenir compte des orientations données par l’autorité politique, des intérêts des employeurs publics dans leur diversité et des intérêts des agents exprimés notamment par le dialogue social. Il s’agit donc de trouver des voies de solutions tenant compte des différents points de vue, toujours dans des configurations très différentes. C’est stimulant et passionnant ! Autre conviction, le dialogue social est une science toute d’exécution : c’est au contact du réel que l’on se rend compte si cela marche ou pas et il faut savoir s’adapter en permanence.

Quel regard portez-vous sur le dialogue social et sur son rôle dans la gestion des crises diverses (sanitaire, géopolitique, économique…) ? Quelles sont les évolutions souhaitables pour l’avenir et quelles seraient les pratiques à conserver ?

Le constat a posteriori est que tous les acteurs du dialogue social ont répondu présents dès le début de la crise en adaptant, sans difficulté les modalités de dialogue à cette période. Cela a permis de faire des points de situation très régulièrement afin de suivre de près les évolutions et de prendre ensemble de grandes décisions modifiant les modes de fonctionnement des administrations. Pour les employeurs, il a été précieux de pouvoir faire remonter, grâce aux organisations syndicales, et au vu de la dispersion des sites sur le territoire, les points d’alerte rencontrés sur le terrain. Les acteurs ont fait preuve de maturité et ont été à la hauteur de la situation. Ils ont dépassé les postures et les positionnements formels, ce qui a permis d’avoir un dialogue social efficient et efficace. C’est d’ailleurs l’enjeu pour la suite… Bien que le dialogue social formel soit nécessaire et essentiel, le dialogue social informel reste fondamental car c’est en amont et par ce biais que les organisations syndicales peuvent réellement influencer la décision finale. En dépit de progrès notables sur la période récente, il y a encore beaucoup de chemin à faire sur ce sujet, et sans doute des deux côtés de la table. 

Vous êtes adhérent de l’association Réalités du dialogue social dont la vocation est de promouvoir le dialogue social. Pourquoi est-ce si important pour vous ?

C’est l’équidistance ! Réalités du dialogue social offre à ses membres, représentants d’employeurs comme de salariés, un espace pour discuter de tous les sujets tout en tenant compte des différents points de vue, dans un esprit d’enrichissement réciproque. Pour porter un dialogue social gage d’efficacité sociale et de progrès, il est important d’arriver à porter cette vision.

Avez-vous vu un film, écouté un podcast ou lu un livre que vous recommanderiez à la Communauté Réalités du dialogue social ?

Les Croisades vues par les Arabes d’Amin Maalouf. Amateur d’histoire, il m’est arrivé de lire des ouvrages sur le sujet, mais toujours du point de vue occidental. Ce livre offre un contre regard très enrichissant, à mille lieux de l’idée que je m’étais faite de cette fresque historique, c’est une histoire moins binaire, plus nuancée. Dans une certaine mesure, cela m’a fait penser à la posture du dialogue social : comme pour toute interaction ou négociation, il est nécessaire de toujours chercher à comprendre le point de vue, la vision et les intérêts de son interlocuteur, se mettre à sa place, accepter que l’autre n’est pas soi et que l’on n’est jamais le centre, c’est comme cela que l’on trouve, à travers l’échange, des accords mutuellement bénéfiques. 



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